... Un soir que je dansais dans une boîte de nuit, le postérieur bien emballé
dans un jean-slim-taille-trop-basse, j'ai rencontré un politicien. Il s'appelait
Jean de Dieu A-pesa-A-tala-té. Cette vieille carcasse d'os rouillés était née
sous le soleil des indépendances. Il menait grand train, costumes griffés
Yves Saint Laurent, ceinture Emmanuel Ungaro, cravate Francesco Smalto,
chemise Louis Vuitton, chaussures Weston en peau d'iguane, cartes American
Express, montre Rolex et Hummer aux vitres fumées. Il m'a draguée avec son
portefeuille lourd de CFA et «son gros français» comme François Ibovi. Je me
suis laissée séduire. Il m'a dit qu'il sortait d'un divorce houleux. En effet, son
ex-épouse, secrétaire particulière à son cabinet à l'époque de leur rencontre,
lui avait tondu la laine sur le dos lors de leur divorce. Infidèle pris sur le fait, il
avait dû en assumer tous les torts. Voilà ce qu'il m'avait raconté. Tu connais le
baratin des politiciens, hein ? Hum ! Il avait versé dans le tuyau de mon oreille
tout un tas de baratins, des dames-jeannes de baratins, des seaux de baratins,
des bassines de baratins, des brouettes de baratins, et moi comme une idiote
j'y croyais. Il avait promis entre autres de construire un goudron devant la
parcelle familiale jusqu'à devant la douche de maman. Il m'avait promis de
mettre le métro, le RER et le tramway de Paris là, dans le village de papa. Il
me donnait 2.000.000 de francs CFA par semaine pour mes besoins. Tu te
rends compte ? J'avais même une voiture avec chauffeur à ma disposition. Le
rêve, quoi ! Nos rencontres n'avaient lieu que dans les chambres VIP de l'hôtel
Olympic Palace et de la résidence Marina : ce n'était que des corps-à-corps
brûlants... sans préservatifs.
Nouvelles sur les ravages du sida, sur la sorcellerie, la mort, le crime, la
folie, l'amour... Ce recueil de Marie-Françoise Moulady vous transportera
dans les coins et recoins du Congo-Brazzaville, à travers l'originalité d'une
douzaine d'histoires bondissantes et re-bondissantes.