Si la création en psychanalyse renvoie à la sublimation, elle se réfère
également à la honte, concept inexistant dans l'oeuvre de Freud, et pourtant
essentiel pour comprendre Der Dichter und das Phantasieren (Le créateur
littéraire et le fantasmer). C'est dans ce texte de 1908 que Freud parle le
mieux du processus créatif. Notamment lorsqu'il écrit que le poète nous
permet de jouir de nos fantaisies "sans scrupules (Vorwurf) et sans honte
(Schämen)".
Lacan a affirmé qu'«il n'y a plus de honte» ; dans notre culture
ajouterons-nous. Quelle place accorder de nos jours, plus d'un siècle après
l'article de Freud, au binôme honte/création tant en psychanalyse que dans la
mouvance artistique, dans la littérature, la pensée philosophique, les
phénomènes de société ainsi que dans les malaises de notre culture ?
Ce livre se propose d'en relever - et révéler aussi - les contours : comme
à l'intérieur d'une mine d'où la psychanalyse extrairait les matériaux
nécessaires à son dynamisme théorico-clinique et à sa pérennité discursive.