Sur les terres glacées, il n'y a pas de fermentations,
pas de dégradations, donc pas d'odeurs. L'odeur témoigne de la
vie. L'hiver, la vie se réfugie dans les maisons.
Un feu de cheminée est une symphonie olfactive. Il faut
réunir du petit bois, des écorces, des lichens, des pommes de
pin, des herbes sèches, on craque une allumette. Avec la
fumée l'odeur monte.
C'est l'origine du mot parfum : per fumum, «par la
fumée». Senteurs boisées, herbacées, toutes ces «notes» vont
varier avec la température du feu. Ajoutez une grosse bûche
de chêne, il sentira les tanins et le whisky ; mettez-y un fagot
d'osier, une odeur de bord de ruisseau se répandra aussitôt.
Si vous brûlez de très vieilles planches, la pièce s'emplira
d'une incompréhensible odeur de vanille.
Mais pour sentir pleinement, le nez ne suffit pas. Il faut la
cheminée, le crépitement des flammes, couleurs, formes et
mouvements.
Il faut les autres sens.
Pour atteindre l'esprit, l'odeur voyage sur des images et
des sons. Elle y fabrique alors des instants inoubliables qui
renaîtront à la moindre "madeleine" qui passe.
Tel est le paradoxe du parfum.