L'église et la grande guerre
1914-1918 : la grande mêlée de peuples commencée en Europe et étendue aux dimensions du monde reste cent ans après un abîme de contraires et de paradoxes. Loin d'y échapper, les catholiques en offrent une saisissante illustration. L'unité de l'Église est mise à rude épreuve par les frères ennemis tandis que Benoît XV, père attendu et récusé, appelle vainement à la négociation et énonce les conditions d'une paix véritable que les traités seront incapables de faire advenir. L'échec du pape marque aussi son retour sur la scène internationale.
Partageant le sentiment général d'une juste guerre, les catholiques des pays belligérants ont conscience de devoir servir leurs patries respectives tout autant que leur commune Église. La lutte qui les sépare de leurs coreligionnaires ennemis conduit certains d'entre eux vers leurs compatriotes et alliés d'autres religions. Elle contribue parfois à les réintégrer à la vie politique.
L'horreur du front rend souvent plus présente la figure du Crucifié et c'est sous la croix que reposent les morts européens. La guerre ne provoque pas un « réveil » religieux durable mais fait naître les totalitarismes et prépare de nouvelles tragédies. Pire, la paix attise le désir de revanche en même temps qu'elle aveugle les vainqueurs sur des périls bien plus grands qu'en 1914. Pourtant, la grande épreuve jette aussi les semences d'improbables rapprochements : oecuménisme, lutte au nom du Christ contre les totalitarismes, pardon mutuel et refus du cycle sans fin de la vengeance.
Dieu écrit droit en lignes courbes...