«Pour fonder son style propre en psychanalyse - et la psychanalyse
n'est pas seulement les "effets" que l'on produit, mais
tout autant la "théorie" que l'on parvient à produire sur ces
effets -, il convient de s'éloigner du texte qui nous a formés
pour interroger notre expérience et la laisser dire jusqu'à l'erreur
s'il le faut. Dire comme un devoir éthique sans souci excessif
de la cohérence ou des ruptures épistémologiques. Dire l'expérience
d'une analyse pour témoigner du parcours d'une
parole en acte.
Cette parole semble chez moi ancrée autour des questions qui
touchent à la fonction paternelle, à la position filiale, à l'intégration
de la loi, la plénitude de la joie, l'énigme de l'amour...
Toutes ces expériences impossibles autour desquelles tourne
ma clinique et qui se déplacent avec les cures qu'il m'est donné
de conduire. Il n'y a pas de psychanalyse en dehors de la clinique
du transfert.
L'expérience d'une psychanalyse ne change pas une personne ;
le déplacement qui s'y opère est oblique, le sujet n'y prend pas
un sens contraire dans la direction de sa vie, cela se passe hors
sens, dans la constatation que nos actes portent autrement,
même si nous demeurons "le même". Nos tics, nos amours,
nos lubies, notre culture, nos habiletés subissent des petits
détours, des variations d'intensité parfois, mais en restant là où
c'était : ce qui "transforme", c'est la manière de dire "je" qui
advient et qui produit une chimie différente dans la chanson de
nos vies.» I.G.M.