Il y a cinq Malraux.
Le premier a eu la chance d'arriver dans un monde
d'après 1914-1918 prêt à se laisser éblouir par un
jeune homme touche-à-tout et talentueux. Il saute
de la brocante à la NRF, des Langues O au surréalisme
et devient, comme Radiguet, une coqueluche
du Paris littéraire.
Le deuxième découvre l'art et le colonialisme, le
roman et le marxisme en Asie. Tour à tour trafiquant,
expert, propagandiste de l'émancipation
indigène, il écrit les trois livres qui vont asseoir
sa notoriété mondiale : Les Conquérants, La Voie
royale et La Condition humaine.
Le troisième Malraux est le combattant, contre l'absurdité
de la guerre, le fascisme, le putsch de Franco
et l'occupant allemand.
Le quatrième Malraux est le compagnon privilégié
du général de Gaulle, le témoin inspiré d'une
France qu'il veut toujours combattante dans la
tâche de libérer les individus et de s'opposer à toutes
les répressions.
Le dernier est le plus influent ministre de la Culture
que la France ait connu, des maisons du même
nom aux grandes expositions thématiques, de Paris
«blanchi» à l'inventaire du Patrimoine.